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Peintre et photographe : dans l'intimité des frères Caillebotte
Les frères Caillebotte : peinture et photographie
Martial Caillebotte a également pratiqué en amateur la photographie. Comme pour beaucoup de personnes aisées de cette époque, la photographie a constitué plus qu'un passe-temps, le moyen de s'exprimer sur les sujets qui les intéressaient, la famille et la vie quotidienne, les voyages et les paysages et dont ils voulaient garder un témoignage. Toute la production de Martial Caillebotte étant restée précisément dans sa famille jusqu'à ses descendants actuels, cette activité n'a jamais été révélée ni prise en compte, sauf à documenter, quand il a fallu, la Vie et l’œuvre de son frère à mesure de la réévaluation de son travail de peintre jusqu'à sa pleine reconnaissance aujourd’hui. Maintenant étudiées avec précision, ces photographies de Martial Caillebotte se révèlent pleines d'intérêt sur les plans historique, documentaire et artistique, tandis qu'elles présentent beaucoup de points communs avec quelques-uns des tableaux du peintre. 
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Dans cette exposition sont donc montrées les photographies de Martial Caillebotte, comparées, associées aux tableaux de son frère quand ceux-ci traitent des mêmes sujets. Souvent la différence se remarque : les cadrages de Maurice Minoret dans l'escalier, ou de Marie Caillebotte téléphonant dans les nouveaux appartements de la rue Scribe retiennent par leur modernité, et le cliché de Gustave Caillebotte et Bergère sur la place du Carrousel, nonobstant le sujet, est son chef-d’œuvre, digne de figurer dans une histoire de la photographie du XXe siècle. 
On a souvent évoqué, depuis le début des études sur la photographie du XXe siècle et les rapports qu'elle a pu entretenir avec la peinture, une possible influence de la photographie même sur la peinture. L’œuvre de Gustave Caillebotte étant à ce point photographique dans ses sujets modernes et surtout dans ses compositions, c'est- à-dire dans le cadrage du motif, l'opinion s'est répandue d'une influence possible de la photographie sur son inspiration pour expliquer l'extraordinaire nouveauté du point de vue de Boulevard vu d'en haut et des Canotiers. Cette nouveauté, cette invention, cette audace ne proviennent pas de la photographie, dans laquelle on ne trouve à l'époque de Gustave Caillebotte nul équivalent. Son art est unique, moins impressionniste, finalement, que réaliste. 
Rien n’indiquait que ce promeneur eut un lien quelconque avec ce que signifiait alors pour un peintre le musée, rien n’indiquait son appartenance à une tradition qui, pour Paul Cézanne comme pour Gustave Moreau et tant d'autres, impliquait la confrontation avec les maîtres du passé. L'homme qui passe devant nous, presque seul dans ce vaste espace, semble détaché du monde des ateliers. Isolé du mouvement de la ville, il trouve, au cœur de Paris, une forme d’identité sociale, celle d'un bourgeois contemporain, libre de toute dépendance. La photographie l'exprime d'autant mieux que l'homme et son chien Bergère ne sont pas seuls, celui qui les photographie partage leur univers. Gustave et Martial Caillebotte ont longtemps vécu des vies parallèles, au moins jusqu'en 1887, date du mariage de ce dernier, participé à des activités communes, chacun dans leur art - Martial, ancien élève du Conservatoire, étant compositeur et musicien -, fréquenté des amis communs, géré au mieux leurs intérêts. Le photographe enregistre un portrait à la fois intime et impersonnel et surtout révèle à cette occasion un rapport esthétique entre le document photographique et une idée de la peinture que Gustave Caillebotte manifeste quasiment
à son insu.